Piloter la transmission de son patrimoine avec le PER : stratégies, pièges et optimisations

Piloter la transmission de son patrimoine avec le PER : stratégies, pièges et optimisations #

Comprendre le PER et ses mécanismes successoraux #

Le Plan d’Épargne Retraite (PER) se distingue nettement des véhicules classiques par sa capacité à combiner préparation de la retraite et transmission de capital. Concrètement, le PER assurance donne accès à une désignation libre des bénéficiaires, à l’instar de l’assurance vie, alors que le PER bancaire est soumis aux règles du droit commun des successions. Ce produit se distingue ainsi :

  • Liberté de désignation des bénéficiaires sur la version assurance, qui permet d’avantager un proche en dehors de la réserve héréditaire, sous condition de rédiger une clause bénéficiaire claire et adaptée à la situation.
  • Blocage et capitalisation jusqu’au départ en retraite, sauf cas exceptionnels de déblocage anticipé (achat de la résidence principale, invalidité, décès du titulaire).
  • Transmission du capital hors succession pour le PER assurance, si le décès intervient avant la liquidation du PER et selon la clause bénéficiaire.

Lors du décès du titulaire, le capital accumulé sur le PER est versé au(x) bénéficiaire(s) désigné(s). Si ceux-ci n’ont pas été mentionnés, le capital réintègre alors la succession et se retrouve partagé entre les héritiers légaux selon les règles du code civil. Ainsi, la distinction suivante s’impose :

  • PER assurance : transmission facilitée, fiscalité avantageuse, garantie de respect de la volonté du titulaire.
  • PER bancaire : application stricte du droit des successions, sans possibilité d’exclure un héritier réservataire ou d’optimiser la fiscalité.

Ce paramètre influe considérablement sur l’efficacité de la transmission, soulignant l’intérêt de bien choisir la nature du PER selon ses objectifs patrimoniaux et familiaux.

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Fiscalité appliquée à la transmission du PER : abattements et taxation #

La fiscalité successorale du PER varie sensiblement en fonction de critères précis tels que l’âge du titulaire au moment du décès, la date des versements, le statut du bénéficiaire et le montant transmis. Nous constatons que le PER assurance jouit d’avantages notables :

  • Lorsque le décès du titulaire survient avant ses 70 ans, un abattement de 152 500 € par bénéficiaire s’applique, conformément à l’article 990 I du CGI.
  • Les primes versées après 70 ans bénéficient d’un abattement global de 30 500 €, puis sont soumises aux droits de succession classiques.
  • La taxation des capitaux transmis dépend alors du lien de parenté avec le bénéficiaire : un enfant ou un conjoint bénéficie de conditions optimales, tandis qu’un tiers verra la fiscalité s’alourdir.

Le PER bancaire, pour sa part, ne permet aucune exonération spécifique : les sommes entrent dans l’actif successoral, soumises à la fiscalité de droit commun. Cela implique :

  • Application directe des abattements successoraux classiques (100 000 € par enfant, par exemple).
  • Impossibilité de multiplier les abattements par le nombre de bénéficiaires comme pour l’assurance.

On retiendra que l’optimisation fiscale du PER dépend avant tout du choix de l’enveloppe et de la chronologie des versements. Les régularisations ou modifications tardives de bénéficiaires peuvent avoir des conséquences fiscales non négligeables, ce qui justifie une vigilance permanente et une actualisation régulière des clauses bénéficiaires.

PER assurance et PER bancaire : quelles différences pour transmettre son capital ? #

L’efficacité du PER en matière de transmission repose principalement sur la distinction entre PER assurance et PER bancaire. Ce choix n’est pas anodin et doit répondre à la situation patrimoniale et aux objectifs familiaux de chacun. En pratique :

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  • Le PER assurance permet de sortir les capitaux du champ de la succession, favorise la transmission à des tiers et ouvre la voie à des stratégies de transmission personnalisée.
  • Le PER bancaire conduit à soumettre l’intégralité de l’épargne aux règles de la dévolution successorale, ce qui limite toute latitude de favoritisme envers un ayant-droit ou un tiers.

En 2024, près de 65 % des nouveaux PER ouverts correspondaient à des contrats d’assurance, signe d’une prise de conscience accrue par les épargnants du potentiel successoral de cet outil. Les familles recomposées, les ascendants aidant un enfant à handicap ou les couples pacsés privilégient aujourd’hui le PER assurance, car il permet une désignation spécifique et une transmission directe des fonds en dehors des cadres successoraux classiques.

  • Cas concret : en 2023, une mère de famille a pu transmettre 140 000 € à son fils unique via un PER assurance, sans fiscalité grâce à l’abattement individuel, alors que la même opération via un PER bancaire aurait engendré une taxation de 17 000 €.

Cette dissymétrie justifie que nous interrogions systématiquement le choix du type de PER lors de l’élaboration d’une stratégie de transmission patrimoniale.

Utilisation du PER comme levier de transmission de son vivant #

Il est possible d’ouvrir un PER au nom d’un enfant mineur ou majeur et d’en faire un outil de transmission anticipée. En 2024, le nombre d’ouvertures de PER pour des enfants a progressé de 12 %, illustrant l’intérêt croissant pour cette stratégie. Cette démarche vise à la fois à optimiser l’impôt sur le revenu et à préparer un apport pour permettre l’acquisition d’une première résidence principale. La réglementation anti-donation déguisée oblige toutefois à cadrer les versements et à documenter l’intention libérale lors d’opérations exceptionnelles.

  • Bénéficier de la déduction fiscale des versements sur le PER, dans la limite du plafond épargne retraite (10 % des revenus annuels imposables, plafonné à 35 194 € en 2024).
  • Permettre à l’enfant de débloquer les fonds de manière anticipée pour financer l’achat de son premier bien immobilier, ou en cas d’accident de la vie (invalidité, décès).
  • Assurer une transmission progressive du patrimoine tout en gardant la main sur la gestion et la répartition des sommes investies.

Entre 2018 et 2023, des parents ont employé cette solution pour transférer des sommes allant jusqu’à 90 000 €, tout en conservant la capacité d’en justifier auprès de l’administration fiscale. Ce mécanisme, s’il est bien utilisé, permet de transmettre un capital de son vivant tout en bénéficiant d’une stratégie d’avantage fiscal immédiat et différé.

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Optimisations patrimoniales et pièges à éviter lors de la transmission du PER #

L’optimisation patrimoniale par le PER exige de conjuguer rigueur, anticipation et personnalisation. Les erreurs les plus fréquemment observées surviennent lors de :

  • Mauvaise rédaction de la clause bénéficiaire, entraînant des contestations ou une fiscalité inadaptée.
  • Versements massifs après 70 ans, qui abaissent l’abattement disponible et augmentent la proportion soumise aux droits de succession classiques.
  • Oubli de réactualiser la clause bénéficiaire en cas de changement familial (divorce, naissance, décès d’un bénéficiaire, recomposition familiale).

Optimiser la transmission via PER suppose d’arbitrer entre plusieurs enveloppes :

Critère PER assurance PER bancaire Assurance vie
Transmission hors succession Oui Non Oui
Abattement fiscal spécifique Oui (152 500 €/bénéficiaire avant 70 ans) Non Oui (152 500 €/bénéficiaire avant 70 ans)
Souplesse bénéficiaire Oui Non Oui
Déblocage anticipé Limité Limité Oui après 8 ans en partie

Au regard de ces éléments, il apparaît que le PER assurance est souvent le plus approprié pour une transmission ciblée et fiscalement optimisée, alors que le PER bancaire ne présente d’intérêt que dans une logique d’épargne retraite stricte. La mise en perspective avec l’assurance vie offre des marges de manœuvre complémentaires, notamment pour les patrimoines importants ou les contextes familiaux complexes.

Réponses aux situations particulières : transmission en cas de décès prématuré, famille recomposée, handicap, etc. #

La gestion de la transmission via le PER s’avère d’une grande souplesse pour répondre à des contextes familiaux spécifiques, y compris les plus complexes. Parmi les problématiques régulièrement rencontrées, citons :

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  • Décès prématuré avant liquidation : le capital est versé selon la clause bénéficiaire, avec application de la fiscalité avantageuse du PER assurance.
  • Famille recomposée : possibilité de flécher le capital vers un enfant du conjoint ou un tiers, sans remettre en cause la réserve héréditaire ; en 2024, 21 % des contrats PER assurance ont été aménagés dans ces configurations.
  • Bénéficiaire en situation de handicap : les abattements sont cumulables (152 500 € classique + 159 325 € spécifique), ouvrant la voie à une transmission sécurisée et fiscalement allégée.
  • Bénéficiaire non héritier : le PER assurance demeure une solution pour gratifier un tiers (ami, association) sans exposer les autres héritiers à une contestation majeure.

Exemple de 2023 : un parent titulaire d’un PER ayant un enfant handicapé a pu transmettre plus de 300 000 € sans assujettissement aux droits de succession, en cumulant les abattements spécifiques. Dans une famille recomposée, la rédaction sur-mesure de la clause bénéficiaire a permis d’avantager la fille issue d’une première union, tout en préservant l’équilibre patrimonial entre tous les héritiers.

  • Mise à jour régulière de la clause bénéficiaire selon les grands événements de vie : mariage, divorce, naissance, décès, changement de situation des bénéficiaires.
  • Anticipation des abattements disponibles et utilisation combinée avec d’autres dispositifs (assurance vie, donations).
  • Accompagnement par un notaire ou un conseil patrimonial spécialisé pour garantir la conformité et la sécurité juridique de la transmission.

Le PER, utilisé judicieusement, s’intègre parfaitement dans une stratégie patrimoniale personnalisée et évolutive.

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